
Le secrétaire général du comité Nobel Thomas Perlmann (d) près des portraits de Mary E. Brunkow, Fred Ramsdell et Shimon Sakaguchi, lauréats du Nobel de médecine, à Stockholm le 6 octobre 2025 ( AFP / Jonathan Nackstrand )
Le prix Nobel de médecine 2025 a été décerné lundi à un trio américano-japonais pour leurs travaux sur la façon dont le corps contrôle le système immunitaire, en particulier l'identification des "gardiens du système immunitaire".
La chercheuse américaine Mary E. Brunkow, 14e femme lauréate du Nobel de médecine, et les chercheurs américain Fred Ramsdell et japonais Shimon Sakaguchi sont récompensés pour leurs "découvertes concernant la tolérance immunitaire périphérique", a annoncé le comité Nobel.
Les travaux distingués "portent sur la manière dont nous contrôlons notre système immunitaire afin de pouvoir lutter contre tous les microbes imaginables tout en évitant les maladies auto-immunes", a expliqué Marie Wahren-Herlenius, professeure à l'institut Karolina.
"Le puissant système immunitaire de l'organisme doit être régulé, sinon il risque d'attaquer nos propres organes", souligne le comité Nobel.
Les lauréats ont ainsi "identifié les gardiens du système immunitaire, les cellules T régulatrices, qui empêchent les cellules immunitaires d'attaquer notre propre corps", ajoute-t-il.
En pratique, les lauréats ont ouvert "un nouveau domaine de recherche et mené au développement de nouveaux traitements, par exemple pour le cancer et les maladies auto-immunes".
Leurs découvertes pourraient également prévenir les complications graves après les greffes de cellules souches, selon le jury.
- Lymphocytes T régulateurs -
Shimon Sakaguchi, 74 ans et chercheur en immunologie à l'université d'Osaka, a réalisé la première avancée dans ce domaine en 1995.
À l'époque, de nombreux chercheurs étaient convaincus que la tolérance immunitaire ne se développait qu'avec l'élimination des cellules immunitaires potentiellement dangereuses dans le thymus, glande située devant la trachée, par un processus appelé "tolérance centrale".
Le chercheur japonais a démontré que le système immunitaire était plus complexe, en découvrant "une classe de cellules immunitaires jusqu'alors inconnue, qui protège l'organisme contre les maladies auto-immunes", explique le jury.
Depuis le Japon, M. Sakaguchi a dit espérer que ce prix permette à la recherche de se développer davantage "dans une direction où il pourrait être appliqué aux malades et dans des contextes cliniques".
Mary E. Brunkow, née en 1961, et Fred Ramsdell, 64 ans, ont fait l'autre découverte clé en 2001, lorsqu'ils ont montré comment un certain type de souris était particulièrement vulnérable aux maladies auto-immunes.
"Ils ont découvert que ces souris possédaient une mutation dans un gène qu'ils ont nommé Foxp3", selon le jury. Ils ont également mis en évidence le fait que des mutations dans l'équivalent humain de ce gène provoquent une grave maladie auto-immune, appelée IPEX.
Deux ans plus tard, Shimon Sakaguchi a réussi à faire le lien entre ses découvertes et celles de Brunkow et Ramsdell: il a établi que le gène Foxp3 régissait le développement des cellules qu'il avait identifiées en 1995.
Ces cellules "désormais connues sous le nom de lymphocytes T régulateurs, surveillent les autres cellules immunitaires et veillent à ce que notre système immunitaire tolère nos propres tissus".
"Ma carrière scientifique a beaucoup changé depuis ces travaux, je ne travaille même plus dans ce domaine particulier. C'est donc un honneur d'avoir pu y participer", a réagi Mary E. Brunkow auprès de la fondation Nobel, soulignant qu'il était nécessaire que "plusieurs cerveaux différents travaillent ensemble" sur ce sujet pour le faire avancer.
La chercheuse travaille à l'Institute for Systems Biology de Seattle, un organisme indépendant de recherche, et Fred Ramsdell à Sonoma Biotherapeutics à San Francisco, une société de biotechnologie.
Mme Brunkow est seulement la quatorzième femme lauréate du Nobel de médecine, sur 232 personnes depuis 1901.
Ces recherches sont à un stade précoce et n'ont pas encore donné lieu à des thérapies qui profiteraient aux patients, a dit à l'AFP Jonathan Fisher, immunologue à l'University College London.
"Il y a un grand fossé entre, d'un côté, comprendre scientifiquement notre système immunitaire ou le manipuler en laboratoire, et, de l'autre, élaborer un médicament qui ait un effet constant et bénéfique chez l'humain tout en restant sûr", dit-il.
- Recherche américaine fragilisée -
Les chercheurs américains tirent à nouveau leur épingle du jeu avec ce prix, mais les coupes budgétaires décidées par Donald Trump alimentent le débat sur le risque d'affaiblissement de la recherche américaine à moyen terme.
"Il règne aujourd'hui un sentiment croissant d'incertitude quant à la volonté des États-Unis de conserver leur position de leader dans le domaine de la recherche", a observé Thomas Perlmann auprès de l'AFP, le secrétaire général du comité décernant le Nobel de médecine, avant la remise du prix.

La recherche autour des hormones de régulation de l'appétit figure en bonne place dans les prévisions des experts pour le prix Nobel de médecine, qui ouvre le bal des récompenses philanthropiques ( AFP / Jonathan NACKSTRAND )
Le Nobel consiste en un diplôme, une médaille d'or et un chèque de 11 millions de couronnes suédoises (près d'un million d'euros).
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